Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol                                       Histoire de la Généalogie de la famille Pasturin

 

 

DE SORÈZE AUX ANTILLES

Histoire et généalogie de la famille Pasturin

Par Anne et Michel Fedry

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couverture pasturin recto couverture pasturin verso

Sommaire :

Sources :

Remerciements à Mme Sylvie de Comte pour le don des documents
précieux concernant les Pasturin

Les « Anciens » de Sorèze connaissent l’existence de la « Maison Pasturin », plus connue de nos jours comme « Maison de l’Orival », dont on aperçoit une partie du parc en arrivant de Revel, juste après le pont de l’Orival.
En effet, Place Jean Mistler, une magnifique grille et un beau portail flanqué de colonnes surmontées de pots à feu en pierre suggèrent l’existence d’une propriété digne d’intérêt.
L’accès principal se fait le long de l’Orival par un portail monumental, chef d’œuvre de ferronnerie du sorézien Rivenq à l’époque de Napoléon III. Une voûte en berceau habillée de bois donne accès à la cour. La maison, bâtie au 19ème siècle, est peu visible de l’extérieur. Une petite entrée existe rue Perdue. On accède à l’orangerie, long bâtiment élégant, par la rue Saint-Martin.
C’est certainement Alexandre Vincent Pasturin qui a fait construire l’ensemble et aménagé le petit parc, y créant même une grotte.

Les Pasturin, c’est une famille protestante dont plusieurs membres furent « maîtres-chirurgiens » à Sorèze du 17ème siècle à la Révolution.

À la fin du 18ème siècle, deux frères, Alexandre Vincent (né en 1759) et Thomas Louis (né en 1766) sont allés chercher fortune aux « Amériques » (aux Etats-Unis et aux Antilles). Tous deux y seront « négociants ». Alexandre Vincent semble avoir connu une certaine réussite avant de revenir à Sorèze. Thomas restera en Guadeloupe, on l’appellera « l’Amériquin ».

Au 19ème siècle, Marc Antoine Gabriel (né en 1777), petit-fils de Thomas qui fut le dernier Pasturin à être qualifié de maître-chirurgien, sera « artiste musicien », et enseignera la musique à l’École de Sorèze. Son fils Thomas Edmond (né en 1806) quittera Sorèze et sera contrôleur « des poids et mesures » à Saint-Gaudens.

Certains Pasturin ont été actifs dans la vie municipale à Sorèze : Élie fut consul en 1698, Alexandre Vincent, de retour de Guadeloupe, fut maire après la Révolution et Michel Adelson, le dernier Pasturin ayant vécu à Sorèze, fut conseiller municipal de 1835 à 1860, date de son décès.

Nous nous sommes intéressés à cett famille Pasturin qui a disparu de Sorèze après 1860, grâce aux recherches généalogiques que nous avons pu effectuer, à la possibilité qui nous a été donnée de consulter les archives de la ville de Sorèze et grâce aussi aux divers documents anciens (testaments, lettres, actes notariés) que nous a aimablement transmis Mme Sylvie de Comte, membre par alliance de cette famille.

S’il n’y a plus de Pasturin à Sorèze depuis 1881, cette famille ne s’est pas éteinte pour autant.
Par la généalogie effectuée ( DESCENDANCE DE MOYSE PASTURIN), nous avons trouvé des Pasturin à Bordeaux, à Paris ou dans les Bouches du Rhône.
Mais notre intérêt portait surtout sur les Pasturin sorèziens, notamment ceux que nous découvrions dans les documents donnés par Mme Sylvie de Comte.

 

De Moyse à Adelson Pasturin
Six générations

 

Par l’étude du testament d’Ellie Pasturin (1735), de la lettre d’Alexandre Vincent Pasturin à son père (1777) et des testaments de Michel Louis Adelson Pasturin (1869) et de Clarice Pasturin (1881), son épouse, complétée par d’autres recherches, notamment dans les Archives paroissiales et les Archives départementales du Tarn, nous évoquons la vie de quelques-uns de ces Pasturin. Et à travers eux se dessinent ainsi quelques moments de la vie sorèzienne sur deux siècles.

DOCUMENTS

 

La première génération connue est celle de Moyse Pasturin, « avocat aux ordonnances de la présente ville de Sorèze », marié à Marthe Augier en 1613.
Ils ont eu quatre enfants connus : Anne, Gabrielle, Gabriel et Claire.

À la deuxième génération, Anne, fille du couple précédent, née vers 1615, décédée le 19 septembre 1692 à Sorèze, est célibataire.

Gabrielle, deuxième fille de Moyse et Marthe Augier, née vers 1618 et décédée le 7 août 1688 à Revel (Haute-Garonne), s’est mariée avec Gabriel Clauzolles (ou Clausolles) de Revel.

À leur sujet, dans les Registres paroissiaux concernant Sorèze (AD du Tarn), on lit que le 15 octobre 1685, dans l’église de Revel et en présence « du curé Maître Jean Fresquet (…) et de Monseigneur l’évêque de Lavaur (…), Gabrielle Pasturin, veuve Gabriel Clauzolles , âgée de 50 ans et Jean Clauzolles, son fils âgé de 15 ans » (les âges sont peu vraisemblables) sont obligés de renoncer « à la religion prétendue réformée » qu’ils ont professée jusqu’alors et font profession de « la religion catholique apostolique romaine (…)» cf. document ci- dessous.

En effet l’Édit de Nantes de 1598 avait donné la liberté de conscience aux Protestants tout en encadrant et limitant strictement leur liberté de culte. Mais en 1685 l’Édit de Fontainebleau révoque l’Édit de Nantes et fait peser sur les Protestants des contraintes de plus en plus lourdes, engendrant des persécutions et les obligeant finalement à abjurer leur foi.

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Quant au fils de Moyse, Gabriel, il est dit « maître-chirurgien »  (1 ) une profession très honorable.

Thomas Pasturin (fils de Gabriel Pasturin et d’Elisabeth Bouisset) sera le dernier Pasturin à être qualifié de « maître-chirurgien » avant d’être « officier de Santé ».

Le concernant, on trouve une petite anecdote dans les registres paroissiaux des Cammazes (AD du Tarn), racontée par le vicaire de Notre-Dame des Cammazes, annexe de Durfort. Par une très froide après-midi du 26 mars 1789, dans la neige, celui-ci était parti à cheval confesser un malade à Durfort. Il faillit se noyer en traversant le Sor en crue, y étant tombé et y ayant perdu chapeau, manteau et capote. Il s’en sortit avec grande difficulté. De retour chez lui et transi de froid, il se fit « soigner une heure après par Maître Pasturin, chirurgien de Sorèze qui se trouva heureusement dans le même temps aux Campmazes pour un autre malade. La saignée me fit un grand bien et je ne me suis senty en rien dans tout mon malheur (…) Je dis la messe le surlendemain (…) C’est pourquoi je remercie le bon dieu et prie bien sincèrement tous mes successeurs dans le Vicariat des Campmazes, de ne jamais s’exposer pour quelle chose que ce soit, surtout quand on ne sait point nager comme moy,

En foy de ce, me suis signé. Prades prêtre vicaire ».

La troisième fille de Moyse et Marthe Augier, Claire, épouse Jean Grimailh le 26 juillet 1626.

À la troisième génération, intéressons-nous à l’un des trois enfants connus de Gabriel, son fils Élie Pasturin (? - 1735) qui sera consul de Sorèze en 1698. Élie et son épouse Magdeleine Boyer ont eu treize enfants connus ; tous n’ont pas survécu.

Nous avons le testament d’Élie du 25 juin 1735, acté le 25 septembre 1735, qui porte le titre de :

« Testament De Monsieur Ellie Pasturin me Chirurgien de Sorèze En faveur des Srs Paul & Thomas Pasturin ses fils »

Y sont mentionnés ses enfants :

Les témoins sont :

« … je sousigne Ellie Pasturin, me chirurgien de la presente ville étant malade et fort avancé en age, considérant la certitude de la mort et l’incertitude de l’heure d’icelle pour non etre pas surpris et suite qu’apres mon déces (…) pour Raison de mes biens jay voulu en disposer comme (…) En premier lieu jay recommandé mon ame a Dieu le priant de Me faire misericorde de mes peches par les merites de la mort et passion nostre Seigneur J C. son fils en second lieu je veus qu’apres mon décés mon corps soit enseveli au Cimetiere de Soreze me remetant pour les prieres a Dieu a la Volonté de demoiselle Magdeleine Boyer ma chere et Bien aymée epouse et venant a la disposition de mes Biens je donne et legue

à Gabriel Pasturin, maître chirurgien, mon fils, l’appartement de derrière la maison que demoiselle Anne Pasturin, ma sœur, épouse du sieurThomasBourrel, tapissier ,jouit dans la présente ville Rue dite Laparayrie (jusqu’à son décès) ;je tiensqu’il se contante (…) de la somme de cent livres léguée par sa grand-mère maternelle jeanne Combes ;

à la dite sœur (…) la jouissance dudit appartement de maison (…)

à Anne Pasturin, ma fille, la somme de deux cents livres, un petit lit de camp garni de cohettes et coussins avec plumes du poids de quarante livres, une couverture de laine, quatre linceuls (draps), deux douzaines de serviettes, deux nappes, unchaudron de cuivre pesant cinq livres, un poilon (…) Plus je lui donne la jouissance de la chambre en la petite dépance au derrière de ma maison poury résider. Si elle vient à se marier la jouissance cessera (…)

à Marie Olympe et à Marie Magdeleine Pasturin, mes deux autres filles mariées cinq jolis « achaume » par-dessus ce que je leur ai donné et constitué dans leur contrat de mariage (…)

à dame Magdeleine Boyer ma chère et aymée épouse les cabeaux (revenus partiels de la métairie) qui se trouveront après mon décès à la metteyrie de Cahuzac à la charge et condition qu’elle ne pourra rien prétendre ni demander pour Raison de ce que j’ai reçu du Bien qui est vendu à Lagarde au diocése de St-Papoul et quelle sera tenue de payer au dit Gabriel Pasturin mon fils la somme de cent (…) Plus je donne et legue à madame épouse la jouissance de tous mes biens meubles et immeubles (…)

en ajoutant au legat ci-dessus fait en faveur dudit Gabriel Pasturin je veux qu’il lui appartienne non seulement la maison de la rue de La Parayrie mais encore tous les autres biens dépendant de la substitution portée par le testament de feu Gabriel Pasturinet Isa beau Clauzolles (…)

À Paul Pasturin mon fils la maison où j’habite avec les meubles excepté la moitié du cuivre et à Thomas Pasturin mon autre fils lui appartiendra la pièce de terre et vigne que je jouis et possède au consulat de Gandels (…)

… après avoir lu ci-dessus, je déclare que joste de la portion deThomas Pasturin mon fils la vigne de Gandels et ainsi qu’il aura que la pièce de terre. Je joins la dite vigne à la portion de Paul Pasturin mon fils c’est ma volonté...

signé pasturin père ».

(auprès de Me Bertrand, notaire Royal de Dourgne)

Extrait du testament d’Ellie Pasturin

Extrait du testament d’Ellie Pasturin

À la quatrième génération, Gabriel Pasturin (1700 - avant mai 1788), l’un des fils d’Élie et de Magdeleine Boyer, maître-chirurgien également, est propriétaire à Sorèze :

Un frère de Gabriel, Paul Pasturin (9 novembre 1710 - ?) est aussi maître-chirurgien.
Il a épousé au Désert Élisabeth Guy, dite Belotte, avec laquelle ils auront onze enfants connus.
Dans un acte paroissial de régularisation du 9 mai 1788, rédigé par le curé Cailhassou dans la maison presbytérale, Élisabeth Guy, veuve de Paul Pasturin, déclare :

Alexandre Vincent, né le 13 janvier 1759, « aujourd’hui en Amérique ».
Thomas Louis Paul né le 4 juillet 1766, « aujourd’hui en Amérique ».
Magdeleine Reyne, née le 4 août 1769,
tous baptisés peu après leur naissance (AC Sorèze).


Acte de déclaration d’Isabeau Guy

Acte de déclaration d’Isabeau Guy

Acte de déclaration d’Isabeau Guy
Registres paroissiaux de Sorèze-AD Tarn

Dans les registres du « Désert » de Revel (1743-1792) on trouve également le nom de la famille Paul Pasturin.

Dans le compoix de Sorèze de 1747, folio 176, mention est faite de « Paul Pasturin, maître-chirurgien, propriétaire d’une maison en solier, rue de Linquant, en angle avec la rue de l’église ». Cette maison, petite, est située en haut de ce qui est de nos jours la rue Lacordaire. Cette parcelle est également visible dans les plans Catala, folio 3 (AC de Sorèze).

Venons-en maintenant à la cinquième génération et aux fils de Paul Pasturin partis « en Amérique», c’est-à-dire aux Antilles.

Alexandre Vincent, dit « Pasturin Ainé », est né le 13 janvier 1759, probablement à Sorèze.
En février 1777, celui-ci envoie à son père Paul une lettre écrite de Pointe à Pitre où il est arrivé le 22 septembre 1776 à dix-sept ans. Il lui réclame un secours financier. À la lecture de cette lettre, on constate qu’il cite des noms de personnes qu’il connaît.

Lettre d’Alexandre Vincent Pasturin à son père

Lettre d’Alexandre Vincent Pasturin à son père-Archives personnelles

« Lettre adressée à Monsieur Pasturin, par
Castelnaudary en Languedoc A Sorèze

Par vôtre humble serviteur
à Mme Bouisset qui reçoit en ce moment la présente

Mon très cher Père

Je vous fais parvenir celle-ci par un Mr qui part à la Martinique samedy prochain, devant faire voille pour Bordeaux, pour vous apprendre mon arrivée dans la Pointe à Pitre, Isle Guadeloupe, depuis le 22 septembre dernier. Je vous aurai écrit plutôt s’il était parti quelque navire d’ici mais il n’y en a eu qu’un seul, par lequel j’ai écrit à mon cher oncle l’ai prié de vous donner de mes nouvelles. Je vous dirai que le 6 septembre dernier il a passé un coup de vent qui a ravagé une grande partie de l’isle, la plus grande partie des maisons de cet endroit ont été renversée ou ébranlée, les plantations toutes détruites ce qui a mis les habitants dans la gêne, tant les sucreries que caffeyé. Il y avait dans la rade soixante et onze batiments, il y en a eu soixante et dix qui ont fait noffrage. Jugé la désolation que cela a cauzé.
Jay vu Mr Lestiez et son fils, ce dernier ma offert un service sy j’avais besoin de quelque chose de lui demander, je lui ay témoigné combien j’étais sensible à cette offre, cependant je lui ai dit que comme nous devions faire un long séjour, je venais à me trouver dans le besoin, je… ce qu’il m’a prié de faire mais je vous assure que ce ne sera qu’à la dernière extrémité, je n’abuserai pas de son honnêteté.
Je suis bien mortifié de n’avoir pu faire une pacotille (3 ), je crois que je ne m’en serai pas mal tiré, au moins cela m’aurait donné un peu de bénéfice, et m’aurait aidé dans la geine que je me trouve, car les dépenses sont fort considérables, et jeserai obligé d’emprunter pour payer mon blanchissage car je n’ay point le sol.
Je vais encore vous importuner en vous demandant quelques paires de bas blancs à côtte et deux paires de drap de lit cet à dire d’un linceul en faire une paire pour pouvoir me mettre dessus tout autant que cela ne vous genera pas. Je vous demande des linceuls parce-que je suis obligé de coucher en culotte tout le temps de mon voyage. Sy vous me les envoyer, donner le moi un peu…, vous pourrez les adresser à ma tante.
J’assure ma chère mère et mareine de mon profond respect. J’écrirai à ma chère mère par le premier navire qui partira, ayant beaucoup de petites choses à lui dire. Ma cincère amitié à mes frères et beau-frère. Prier ma sœur si elle peut de se souvenir de moy. Sy le bon dieu en qui j’espère et mis toute ma confiance me favorise, je saurai de lui reconnaitre. Mes respects à mon cher oncle et tante Pasturin ainsy qu’à mon grand père et grand mère, je leur ay écrit plusieurs fois à ces derniers et je nay jamais eu de reponce. Vous pourrez dire à mon cousin Blaquière que j’ai fait parvenir sa lettre à son frère lequel est parti pour la nouvelle Angleterre depuis quelque temps, là où il a été faire un voyage, il doit être de retour sous peu.
On parle beaucoup de guerre dans cette colonie et on la craint beaucoup. Les nouveaux angleterriens sont toujours en guerre avec les Royalistes, ils font des prises tous les jours tant d’un côté que d’autre.

Mr Deroudet qui jouit d’une santé parfaite vous assure bien de son respect ainsy qu’à la famille, et moy qui finit en vous……mille et mille fois, et vous prie de vouloir m’aider dans mon indigence et de ne pas oublier un fils qui ne respire que pour son tandre père.

Je suis avec un très profond respect
Mon très cher Père
Votre très humble et très soumis fils
Pointe à Pitre Guadeloupe Le 24 février 1777

 

 

Extrait de la lettre d’Alexandre Vincent

Extrait de la lettre d’Alexandre Vincent à son père
Archives personnelles

Alexandre Vincent était-il en bons termes avec son père ? Cette lettre est la première qu’il lui envoie alors qu’il dit avoir déjà écrit à toute la famille, notamment plusieurs fois à ses grands-parents. Combien de temps est-il resté en Guadeloupe ? Pourquoi y est-il parti si jeune ? Comment y-a-t-il fait fortune ? On sait seulement qu’il est déclaré « négociant à la Pointe à Pitre en 1787-1790 » (4 ).

La Révolution française a semé beaucoup de désordre aux Antilles où la guerre civile menaçait après l’abolition de l’esclavage (restauré toutefois en 1802) par les Révolutionnaires. En plus d’un climat très difficile à supporter et très meurtrier, la situation économique était très dure pour les Blancs comme pour les Noirs (crises sucrières, ouragans, tremblements de terre etc.).

On ignore la date à laquelle Thomas Louis Paul, plus jeune de sept ans que son frère Alexandre Vincent, a rejoint ce dernier en Guadeloupe. Ensemble ils y ont fait des affaires : dans différents actes on trouve les mentions « Pasturin Frères » ou « Pasturin Aîné » et « Pasturin Cadet » (Généalogie et Histoire de la Caraïbe).

Toutefois en l’an II, le 22 pluviose (10 février 1794) Alexandre Vincent est maire de Sorèze et ce jusqu’en l’an IV. Selon Yves Blaquière, il a joué un rôle important sous la Révolution et jusqu’à son décès en 1820. Il eut sans doute la reconnaissance de ses concitoyens puisque, en 1833, l’actuelle rue Perdue était dénommée « ruePasturin » dans le cadastre napoléonien (1833).

À quarante ans, le 18 juin 1799, à Revel, Alexandre Vincent épouse Paule Delphine Galinié. Ils auront quatre enfants. Michel Adelson, l’aîné, sera le dernier Pasturin ayant vécu à Sorèze.

En 1807 Alexandre Vincent est dit propriétaire rue Malmagrade. Il ne peut être que celui qui a fait construire à Sorèze la belle demeure et ses communs. La date de 1809 est visible sur la clef de l’arc du portail d’entrée donnant le long de l’Orival (l’orangerie ne datant que de la deuxième moitié du 19ème siècle). La porte de la maison, donnant sur l’actuelle rue Perdue, est ornée des lettres entrelacées « AP et V », laissant bien supposer que c’est Alexandre Vincent Pasturin le propriétaire…

Il décède le 3 avril 1820 à Sorèze, « dans sa maison sise Faubourg deRevel », à l’âge de soixante et un ans. Son fils aîné, Michel Adelson, est alors âgé de vingt ans ; il occupera cette maison.

Thomas Louis Paul est né à Sorèze le 4 juin 1766. Il est surnommé plus tard « l’Amériquin ».
Comme son frère Alexandre Vincent, il est dit « en Amérique » en 1788, dans la déclaration de régularisation du mariage de ses parents et de sa naissance (document évoqué précédemment). Il devient en effet négociant en Guadeloupe où il a fait souche.
Pour preuves :

  1. « Thomas Pasturin, négociant, est témoin le 11 avril 1807 pour la naissance d’un descendant du négociant Cadiot » (Généalogie et Histoire de la Caraïbe).
  2. le 30 janvier 1816, à Pointe à Pitre, Thomas Pasturin est encore témoin au mariage Reimonenk-Guercy ; le marié est négociant et la mariée, « fille de négociant ».

En 1802, il se marie avec Marie Charlotte Duclos (1780-1858), fille de Jean Baptiste Duclos-Plessis (1757-1802) et de Rose Jeanne de Kater (1753-1715), nom d’origine hollandaise. Le mariage a lieu à New-York où les Duclos ont émigré de Sainte-Rose (Guadeloupe) en 1794

Le couple aura cinq enfants connus : une fille Rose Alexandrine et quatre garçons.
Dès l’âge d’à peu près huit ans, les quatre garçons seront pensionnaires à l’École de Sorèze, entre 1815 et 1826. François Thomas y étudiera pendant huit ans, Jules Marie onze ans, Louis Marie Georges dix ans et Marie Thomas quatre ans. Plus tard, le petit- fils de Marie Thomas, Xavier Gustave Édouard y sera aussi pensionnaire pendant huit années.

Ce dernier sera « Comte de Faucompré », car il fut « reconnu par sa mère suivant un acte du 15 janvier 1896 passé devant notaire à Basse-Terre,quil’autoriseà porter le nom de Faucompré ». Il a alors quarante-cinq ans. (Généalogie et Histoire de la Caraïbe - n°206 - septembre 2007 p. 5285).

Marie Charlotte Duclos (5 ) décèdera en 1838, au château de Pray à Amboise (Indre-et-Loire).
Thomas Louis Paul décèdera la même année, le 12 novembre, en Guadeloupe.

À la sixième génération, le dernier Pasturin vivant à Sorèze est Michel Louis Adelson Pasturin, couramment prénommé Adelson, l’aîné des enfants d’Alexandre Vincent et de Paule Delphine Galinié.

Michel Louis Adelson Pasturin -1870

Michel Louis Adelson Pasturin -1870 - Archives personnelles

 

Né le 15 mars 1800 à Sorèze (2 ventôse an VIII), il sera élève à l’École de 1808 à 1817.
À trente-quatre ans, le 6 novembre 1834, à Castres, il se marie avec Aimée Françoise Clarisse Prat, née à Castres. Elle a vingt-et-un an. Le couple n’aura pas d’enfant.

Adelson est dit « propriétaire à Sorèze dans les plus forts imposés » (AC Sorèze). On ne lui connait pas de métier ; c’est sans doute un rentier.
Il habite rue Pasturin, au « Faubourg de Revel » à Sorèze. Dans sa propriété, celle qu’a fait construire son père, « en 1834, les différents corps de bâtiments sont établis sur les quatre côtés de la cour. Par contre, la parcelle située à l’est, en face de l’École, est en jardin comme en 1796, et elle appartient à Raymond Dominique Ferlus, directeur de l’École. Ce n’est que dans la deuxième moitié du 19ème siècle, après avoir acheté cette parcelle que la famille Pasturin fera construire l’orangerie dans le prolongement de l’aile nord ». (CAUE-Tarn, Inventaire général, Adeline Béa, Région Midi-Pyrénées).

Dès 1835 Adelson est conseiller municipal et ce jusqu’à sa mort, le 30 octobre 1869, dans sa maison de Sorèze, à soixante-neuf ans. Son décès semble survenu à l’issu d’une maladie, car il n’assiste plus aux réunions du Conseil municipal de l’année 1869. Dans une délibération du Conseil municipal du 14 novembre 1869, le maire Adrien Clos, lui rend hommage :
« M. le Maire tient à exprimer les regrets qu’a laissé dans le Conseil la perte de M. Adelson Pasturin, l’un de ses membres les plus anciens et les plus dévoués aux intérêts de la commune ».

Témoin de ce dévouement, une médaille d’honneur de 1845, du Ministère de l’Intérieur,
« au Sieur Pasturin (Adelson), propriétaire à Sorèze, pour le courage et le dévouement dont il a fait preuve dans plusieurs incendies notamment le 13 mars 1844 (…). Ce diplôme lui a été délivré afin de perpétuer dans sa famille et au milieu de ses concitoyens le souvenir de son honorable et courageuse conduite ».

MEDAILLE

 

Dans son testament du 30 octobre 1869, Adelson lègue tous ses biens à son épouse Clarice à l’exception du château et domaine de Beaufort, du domaine de Champeaubois et du domaine des Moureaux qu’il lègue à son frère Elie Pasturin et à la fille unique de celui-ci, Blanche.

« à mon épouse Clarice …. En témoignage de ma reconnaissance pour les soins qu’elle n’a cessé de me prodiguer, je donne et lègue en pleine propriété :

1- ma maison meublée à Sorèze avec orangerie et jardin,

2- les vignes et prairies situées sur le coteau de Bernico,

3- ma propriété située à Engros (commune de Cahuzac)

4- mes domaines de Latour et du Cédassier (…) ».

Adelson est inhumé dans le cimetière de Sorèze, « affecté au culte protestant »,comme son épouse Clarisse qui décède douze ans plus tard, le 1er novembre 1881, à l’âge de soixante-neuf ans aussi.

Dans son livre « Les souvenirs du pasteur Rabaud », Camille Rabaud (1827-1921) qui fut pasteur à Castres, évoque « (…) notre chère tante Clarisse Pasturin, veuve depuis longtemps et n’ayant pas l’habitude des affaires, elle avait chargé Emile Dardié des réparations et des constructions de ses fermes ; et elle m’avait confié la garde et la gestion de son portefeuille (…) Cela dura de longues années (…) Notre chère tante jouissait de notre joie, c’était pour elle une fête de nous recevoir.
Mais en 1881, atteinte d’anémie et d’une maladie du cœur (…)elle rendit bientôt son âme à Dieu, sa tête appuyée sur mon épaule ».
Il dit ailleurs :
« Elle avait toujours pour sa nièce, Malvina, une prédilection marquée ; elle venait nous voir souvent, comme elle nous réclamait à Sorèze ».

Dans son testament du 1er novembre 1876, exécuté en 1881, Clarisse institue Camille Rabaud son « légataire général et universel ».
Elle lègue ses biens à son neveu et à ses deux nièces, les trois enfants de sa sœur Nancy Prat mariée à Adolphe de Comte. Il s’agit d’Albert de Comte, Malvina de Comte, épouse de Camille Rabaud et Élise de Comte, épouse d’Émile Dardié.

Elle lègue à « Mme de Comte, sa sœur née Nancy Prat, veuve de M. Adolphe de Comte »,

  1. la jouissance de sa maison avec orangerie, jardin, meubles, argenterie, linge, cuivre,
  2. ses vignes et prairies à Bernico,
  3. et une rente annuelle et viagère de 6000 francs.

    Elle « donne et lègue en toute propriété à Mme Malvina de Comte, épouse de Camille Rabaud (…) » la maison de Sorèze avec orangerie et jardins, et les vignes et prairie sur le coteau de Bernico, les domaines de Latour et du Cédassié, ainsi que son portefeuille, à charge pour elle de donner à son frère Albert de Comte et à sa mère des rentes viagères annuelles (respectivement 60 000 et 7000 francs) ».

    Elle « donne et lègue à M. Albert de Comte ses propriétés à Verdalle (métairie Grande, prairie d’Ambre, les petits prés), la propriété d’Engros à Cahuzac et une somme de 60 000 francs pour servir une rente annuelle et viagère de 2 000 francs à Mme Élise de Comte, épouse de M. Emile Dardier ».

    Enfin elle « donne et lègue à Mme Elise de Comte une rente annuelle et viagère de 2 000 francs que son frère, M. Albert de Comte, lui fera sa vie durant ».

    Elle fait aussi différents dons d’argent, vêtements ou petit mobilier à des connaissances, et n’oublie pas la bonne, Marie Maurel, à qui elle donne le mobilier d’une chambre, du linge, des meubles, une petite batterie de cuisine, et une rente viagère de 300 francs « si elle reste chez moi jusqu’à ma fin (…) pour récompenser cette brave fille de son dévouement que j’ai bien apprécié ».

    En tout dernier lieu elle émet le désir « que mes propriétés ne soient jamais vendues, la maison sera je l’espère un lieu d’union ? que ma sœur et ses trois enfants trouvent une joie dans mon souvenir, qu’ils pensent à une sœur, à une tante, qui les a toujours aimés. Je n’ai pas besoin de recommander les pauvres, je connais assez le cœur de tous pour être convaincue qu’on ne les oubliera pas.
    Fait à Sorèze, le premier mars mille huit cent soixante et seize
    Clarice Pasturin »

    Contrairement au souhait de Clarice, l’ensemble de la demeure de Sorèze aurait été vendue vers 1920.

    On ne parlera plus de la « maison Pasturin », mais de la « maison de l’Orival »…

la tombe Pasturin au cimetière protestant de Sorèze.

Le temps passe …
Etat actuel de la tombe Pasturin au cimetière protestant de Sorèze.

       la tombe Pasturin au cimetière

 

Album Photos

Grilles et portes de la propriété Pasturin


 

Grilles et portes de la propriété Pasturin-1

             

Grilles et portes de la propriété Pasturin-3

 

 

 

.1- Au début du 17ème siècle, les maîtres-chirurgiens, dits de « robe longue » portent une longue soutane noire et sont organisés en confréries, la plus connue étant celle de St-Côme. Ils font les opérations de l’époque : trépanations, hernies, fistules, amputations, cataractes, opérations de tumeurs (notamment les cancers du sein), hémorroïdes et même des trachéotomies (pour soigner le croup).
Ils sont « maîtres-chirurgiens » car ils ont été reçus « maîtres es dites sciences ». Ils se différencient des « chirurgiens-barbiers » dits de « robe courte » qui soignent clous, anthrax, bosses et charbons, mais aussi coupent les cheveux et rasent les barbes. Ils appliquent les ventouses et font la saignée. Après l’édit de 1656, les deux corps fusionnent. Puis en 1691 a lieu la séparation officielle de la chirurgie et de la « barbarie ».
En 1731 sera créée l’Académie Royale de Chirurgie où seront enseignées l’anatomie, l’ostéologie et la pratique des opérations chirurgicales.

2-Imposition de 1790 faite par Me Clos. Ces parcelles sont visibles sur le folio 1 des plans Catala du 18ème siècle et dans le compoix de Sorèze.

3-La « pacotille » qu’il évoque dans sa lettre veut dire « marchandises ». En effet, « parmi les Européens venus en Guadeloupe, le pacotilleur est celui qui fait le trajet de France avec des marchandises confectionnées telles que des souliers, bottines, chemises, bas, mouchoirs auxquelles il joint des pièces de toile et de drap. Il va de foire en foire, de ville en village, et il y en a qui sont assez heureux pour réussir à faire une petite fortune dans ce commerce » (Jean Marie Pardon - La Guadeloupe depuis sa découverte à nos jours - 1881).

. 4-Généalogie et Histoire de la Caraïbe, 192, mai 2006, p 4861

. 5-« La famille Duclos est représentative de ces familles anciennes de la Guadeloupe dont l’ancêtre est arrivé aux Antilles au 17ème siècle, qui ont monté en notabilité et richesse jusqu’à la fin du 18ème siècle, ont émigré à la Révolution (ici aux Etats-Unis), dont les membres ont ensuite été dispersés (New-York, Guyane), certains tentant un retour dans leur île d’origine pour, finalement, à la génération suivante, la quitter définitivement au milieu du 19ème siècle, lors de l’abolition de l’esclavage » (Généalogie et Histoire de la Caraïbe, 2011, art 007). En effet, une partie de la famille Duclos revint en Guadeloupe mais pas à Sainte- Rose.

 

 

 

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